Alors que 10 nouveaux pays sont entrés dans l’Union européenne le 1er mai 2004, la Bulgarie et la Roumanie sont en lice pour intégrer l’Union européenne. Ayant déposé leur candidature depuis 1995, la Bulgarie et la Roumanie ont commencé les négociations d'adhésion en 2000 mais le respect des critères de Copenhague n'avait pas été jugé suffisant par le Conseil européen. Un délai supplémentaire leur a été accordé et l'Union s’est fixé comme objectif de les accueillir, s'ils sont prêts, en 2007. Dans cette perspective, l'Union continue à veiller à l'amélioration de leurs moyens administratifs et judiciaires ainsi qu'à la poursuite des réformes économiques et structurelles et à la mise en œuvre de l’acquis communautaire.
La Croatie, quant à elle, a déposé sa candidature officielle à l’Union européenne le 21 février 2003. Elle entamera cette année des négociations en vue de son adhésion à l’Union. Le rythme des négociations dépendra des progrès qu'effectuera la Croatie pour remplir les exigences de l'adhésion. Ce pays doit faire des efforts supplémentaires dans les domaines des droits des minorités, du retour des réfugiés, de la réforme du système judiciaire, de la coopération internationale et de la lutte contre la corruption. Un dernier point important reste la coopération avec le Tribunal Pénal International : la Croatie devra faire en sorte que le général croate Ante Gotovina, inculpé par le TPI pour crimes de guerre contre les Serbes de Croatie, soit localisé et transféré à La Haye.
Le cas de la Turquie est différent.
Pays candidat à l’entrée dans l’Union européenne depuis 1999, la Turquie souhaite rejoindre les 25 états membres.
Tout au long du 20ème siècle, la Turquie n’a cessé de consolider son caractère européen. Au début des années 50, elle a rejoint l’Organisation du traité de l’atlantique nord (OTAN), puis le Conseil de l’Europe. En 1963, un accord d'association conclu entre la Communauté économique européenne et la Turquie, prévoit un rapprochement économique et commercial. La Turquie a présenté sa demande d’adhésion à l’Union européenne en avril 1987 et c’est en décembre 1999, que les partenaires européens lui ont octroyé le statut de candidat lors du Conseil européen d’Helsinki.
Le 17 décembre 2004, le Conseil européen accepte d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Turquie.
En tout état de cause, la Turquie, candidat ayant vocation à rejoindre l'Union, doit respecter les critères politiques de Copenhague avant l'ouverture des négociations. Elle doit ensuite respecter l'ensemble des critères de Copenhague - politiques, économiques et reprise de l'acquis communautaire - pour pouvoir adhérer. Elle a réalisé d’importants efforts dans cette perspective ; il reste encore des mesures législatives ou réglementaires à prendre et il reste surtout à vérifier la mise en œuvre effective sur le moyen terme de ces réformes.
Les négociations débuteront le 5 octobre 2005. Ces négociations dureront de nombreuses années (entre 10 et 15 ans) sous le contrôle des institutions européennes qui pourront décider à tout moment de leur suspension ou de leur arrêt définitif. L’ouverture des négociations ne préjuge aucunement de leur issue qui dépendra des Turcs eux-mêmes.
Mais l’expansion de l’Union en dehors du continent dérange et interpelle. La Turquie n’étant pas géographiquement en Europe, son adhésion en susciterait d’autres, tout aussi légitimes (Israël, Maroc, Tunisie, Asie centrale, Caucase). De même, les déséquilibres démographiques qui en résulteraient inquiètent. Avec les 100 millions d’habitants à l’horizon 2050, la Turquie sera le pays le plus peuplé d’Europe.
On s’interroge sur la nature durablement démocratique d’un régime garanti par l’armée. Le non-respect des Droits de l’Homme est régulièrement signalé. L’état réel de son économie, qui compte de fortes disparités et apparaît marquée par une très grande instabilité, est dénoncé comme incompatible avec le grand marché.
La réalité de la société turque, en pleine et rapide évolution mais qui reste marquée par un vif nationalisme et des mœurs étrangères aux nôtres, semble s’opposer aux valeurs de l’Europe et à leurs déclinaisons (tolérance, Etat de droit, respect de la personne humaine). Enfin Chypre est toujours partiellement occupée par l’armée turque.
Ni L'Europe ni la Turquie ne sont prêtes à l'adhésion.
L'Union Européenne, qui vient de s'élargir doit réussir l’intégration de ses 10 nouveaux pays avant de penser à un autre élargissement.
La Turquie est très loin de l’Europe sur les plans politique, économique et social. Il ne s’agit pas aujourd’hui d’admettre dans l’Europe la Turquie telle qu’elle est. Elle doit poursuivre sa transformation et faire ses preuves. Un long chemin reste à parcourir mais la perspective de l’adhésion est un moteur qui stimule les changements. Il faut lui laisser le temps.
Les Français seront interrogés par le biais du référendum (vers 2014) sur l'élargissement de l'Union européenne à la Turquie, à l'issue des négociations si celles-ci se terminent positivement.
La Turquie ne pourra entrer dans l’Union européenne que si elle est en mesure de remplir les obligations qui en découlent, en remplissant les conditions économiques et politiques requises. L'adhésion requiert de la Turquie qu'elle ait des institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection, l'existence d'une économie de marché viable ainsi que la capacité de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union. L'adhésion présuppose la capacité de la Turquie à en assumer les obligations, et notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire.
L’Europe doit montrer sa maturité et son courage dans le traitement de cette question et sortir de l’ambiguïté. Si la Turquie répond aux exigences européennes et respecte pleinement ses valeurs, on ne peut pas ne pas lui tendre la main. Il est dans l’intérêt de l’Europe d’avoir une Turquie stable, moderne qui adhère aux principes de la démocratie et de la laïcité. La rejeter équivaudrait à la livrer à l’obscurantisme de ceux qui ont fait de l’Orient une poudrière.